Bibliographie catholique

La formation au catholicisme, indispensable pour atteindre le Ciel après son baptême, se heurte dès le départ à un écueil de taille: que faut-il lire, et dans quel ordre ?

Il faudrait plusieurs vies pour s’imprégner de tous les écrits édifiants; il convient donc de choisir raisonnablement les ouvrages clés à lire en priorité.

De par sa grande érudition, Louis-Hubert Rémy propose dans l’article suivant les quelques livres majeurs permettant d’acquérir une foi solide en un temps relativement court.

Outre la retraite de Saint Ignace, lecture et praxis tout à la fois, l’auteur définit un enseignement en deux parties: connaître et pratiquer le bien, dépister et combattre le mal.

Une fois cette étape accomplie, il convient d’approfondir notre lien avec Dieu par l’étude du magistère, l’apologétique, la méditation ou la connaissance des prophéties. Dans un monde où trouver du temps pour se former peut être compliqué, n’en perdons pas en lectures inutiles ou superficielles, et allons directement au coeur de l’apprentissage de la Vérité.

Trouver tous les ouvrages sur le site libérius.net :

PREMIÈRE PARTIE

LES VINGT LECTURES DE BASE

Pour les personnes disposant de très peu de temps pour la formation doctrinale, nous avons établi une liste de vingt ouvrages de base. Par lequel commencer ? Nous proposons une numérotation, conçue d’après deux principes : étudier d’abord la vérité, et seulement ensuite les erreurs ; commencer par des synthèses générales, puis voir en détail certains points importants.

Nous conseillons toutefois de ne pas se contenter de ce strict minimum et de lire aussi, dans un deuxième temps, les ouvrages marqués de deux astérisques. Ces lectures à leur tour donneront, nous l’espérons, envie d’aller jusqu’aux trois étoiles ! Vous trouverez un descriptif détaillé du contenu des ouvrages de base et des autres livres essentiels en consultant la deuxième et la troisième partie de la bibliographie catholique.

I. CONNAÎTRE, AIMER, PRATIQUER LA DOCTRINE CHRÉTIENNE

  1. Acquérir une solide vue d’ensemble : commencer par exemple avec le Catéchisme illustré de gravures (ESR), et continuer éventuellement avec celui de Spirago : Catéchisme catholique populaire (ESR)
  2. Bien connaître l’armée du bien et celle du mal : Mgr Gaume : Traité du Saint-Esprit (ESR)
  3. S’orienter dans la vie spirituelle : Tanquerey : Précis de théologie ascétique et mystique (ESR)
  4. Acquérir la véritable dévotion mariale : Saint Grignon de Montfort : Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge
  5. + 6. + 7. « Méditez les fins dernières et vous ne pécherez jamais »: Ricardo Torrens : Du nombre des élus (ESR) + Mgr Gaume : La vie n ‘est pas la vie (ESR) + au choix, soit Saint Alphonse : La bonne mort (ESR), soit Mgr de Ségur : L’enfer ?
  1. Savoir quel est le système politique voulu par Dieu : au choix : soit le livre plus court du Marquis de La Franquerie : La mission divine de la France (ESR), soit deux chefs d’œuvres qui se complètent mutuellement : abbé Vial : Jeanne d’Arc et la monarchie (ESR) et père Ayroles : Jeanne d’Arc sur les autels et la régénération de la France (ESR)
  2. + 10. Savoir ce que Dieu veut sur le plan social : Mgr Delassus : Vérités sociales et erreurs démocratiques (ESR) + au choix, soit Mgr Lefebvre : Ils l’ont découronné (DPF), soit Théotime de Saint Just : La royauté sociale de NSJC d’après le cardinal Pie (ESR)

Supplément pour les parents et éducateurs : cardinal Antaniano : Traité de l’éducation chrétienne des enfants (ESR) + père Barbara : Catéchèse catholique du mariage (DPF) + vénérable père Dupont : La perfection du chrétien dans tous les états de vie (ESR)

Supplément pour les foyers qui ont un téléviseur : Pierre-Michel Bourguignon : « On vous en mettra plein la vue ! », Lecture et Tradition, (DPF)

Nota bene : pour tous les aspects de la religion chrétienne, on se reportera avec fruit à l’enseignement pontifical antérieur à Jean XXIII. La papauté est un guide excellent entre tous !

Nota bene : Pour « démarrer », et aussi pour persévérer dans la bonne voie, faites et refaites les Exercices spirituels de saint Ignace. Leur importance est CAPITALE ! Ils sont « le code le plus parfait dont tout soldat du Christ doit faire usage… Saint Ignace le reçut comme des mains de la Mère de Dieu » (Pie XI).

II. DÉPISTER ET ABHORRER LES DOCTRINES ERRONÉES

  1. + 12. + 13. Savoir qui tire les ficelles des révolutions : Mgr Delassus : La conjuration antichrétienne (ESR) + abbé Meinvielle : Le judaïsme dans le mystère de l’histoire (DPF) + Ousset : Pour qu’il Règne (en édition non édulcorée de 1959, DPF)
  1. Comprendre le mécanisme des contre-révolutions créées de toutes pièces par l’ennemi : Vaquié : « Réflexions sur les ennemis et la manœuvre », Lecture et Tradition (DPF)
  2. Voir clair : vénérable Holzhauser : Interprétation de l’Apocalypse (lire au moins le 5è et 6è âge, ESR)
  3. Le manuel indispensable pour combattre judicieusement : Dom Sarda : Le libéralisme est un péché (ESR)
  4. + 18. Historique de la crise actuelle de l’Église : Ploncard : L’Église occupée (jusqu’à Pie XII, DPF) + abbé Le Roux : Pierre m’aimes-tu ? (après Pie XII, DPF)
  1. Un aspect important de cette crise : au choix : soit la brochure des cardinaux Ottaviani et Bacci : Bref examen critique du « novus ordo missae » (DPF, et non Fideliter), soit le livre plus complet de Silveira : Le « novus ordo missae », qu’en penser ? (DPF)
  2. Autre aspect important de cette crise : deux articles sur la gnose (Vaquié + abbé Curzio Nitoglia : cf. troisième partie, section 4)

DEUXIÈME PARTIE

CONNAISSANCE APPROFONDIE DE LA VÉRITÉ

I. SAINTES ÉCRITURES ET EXÉGÈSE

La Sainte Écriture doit être lue et expliquée sous le regard de l’Église. L’exégète doit se conformer à l’enseignement des Pères de l’Église et des papes. Toutes les hérésies sont fondées sur une mauvaise interprétation de la Bible. Satan tenta Notre-Seigneur en dénaturant le sens de certaines phrases de l’Ancien Testament. Les hérésiarques ont toujours essayé d’appuyer leurs inventions sur la Bible, et ils ont toujours violemment attaqué la Tradition (Pères et papes).
 

À l’instar de Luther, qui tronquait la texte même des Saintes Écritures pour justifier ses hérésies, les éditeurs modernes altèrent le texte sacré et le truffent de notes tendancieuses ou fausses. Il est vivement recommandé de s’abstenir d’acheter toute Bible ayant paru depuis 1960 : Bible de Jérusalem, T.O.B. (Traduction Œcuménique de la Bible), Chouraqui, etc., et d’acquérir de préférence la Vulgate traduite en français, (DPF).
 

Voici quelques commentaires doctrinalement sûrs et extrêmement riches en enseignements :
 

Ségur, comtesse de : Bible d’une grand-mère, écrite au XIXè siècle, (DPF).

Ce livre constitue une sorte de mélange entre Bible et catéchisme. Une grand-mère raconte l’Ancien et le Nouveau Testament à ses petits-enfants, qui lui posent des questions. Pour les enfants à partir de 9-10 ans, on commencera par le tome I (Ancien Testament), parce qu’ils ont déjà acquis auparavant un support chrétien. Les enfants de 5-6 ans devraient commencer par le tome Il (Nouveau Testament), parce qu’ils ne comprendraient pas tous les passages de l’Ancien Testament.
 

Saint Thomas d’Aquin : La chaîne d’or, (ESR) Commentaire linéaire de chacun des quatre Évangiles. En lisant cette œuvre méconnue, vous aurez l’impression d’être dans un cénacle où siégeraient Athanase, Augustin, Basile, Chrysostome, Grégoire, Jérôme et tant d’autres saints. Au milieu de ces docteurs de l’Église, saint Thomas d’Aquin fait la lecture de l’Évangile. Chaque phrase retient son attention. Mais son humilité le pousse à faire intervenir à sa place chacun des Pères qu’il sait devoir le mieux expliquer la texte qui se déroule. La Chaîne d’or est un merveilleux outil de travail, chaque fois que vous aurez besoin de comprendre un passage de l’Évangile obscur ou controversé. L’explication sera claire et sûre, bien différente d’une simple paraphrase. Comment soupçonner que chaque verset puisse receler tant de richesses et d’enseignements !

Ludolphe le Chartreux : La grande vie de Jésus-Christ, ouvrage du Moyen Âge, traduction française en 7 tomes, 1870 – 1872. Ludolphe le Chartreux, auteur célèbre au Moyen Âge, nourrit son traité de nombreux commentaires tirés des Pères de l’Église.

II. CATÉCHISMES

Il faut commencer par apprendre les rudiments de la foi dans le catéchisme. On élargira ses connaissances théologiques ensuite (voir les autres sections de la deuxième partie de notre bibliographie).

Malheureusement, le venin moderniste circule abondamment dans les catéchismes modernes, comme par exemple Pierres Vivantes. Nous avons sélectionné les meilleurs catéchismes qui existent.

BASE * Catéchisme illustré de gravures, (ESR)

Le texte clair est complété par de belles gravures du XIXè siècle, qui aident l’enfant à graver les leçons dans son cœur.

BASE ** Spirago, François : Catéchisme catholique populaire, 1903, (ESR)

Les phrases importantes sont écrites en grands caractères, ce qui permet de bien les retenir. En petits caractères, l’auteur ajoute de nombreux exemples, qui rendent son catéchisme très vivant.

*** Catéchisme du concile de Trente, (ESR) Le catéchisme de Trente tranche toutes les querelles avec une autorité et une certitude absolues ; il est un véritable « marteau des hérésies » !

*** Gaume, Mgr Jean-Joseph : Catéchisme de persévérance ou Exposé historique, dogmatique, moral, liturgique, apologétique, philosophique et social de la religion, depuis l’origine du monde jusqu’à nos jours, 8 tomes, plusieurs éditions au XIXè siècle (ESR). Il existe une brochure du même auteur, contenant un abrégé du catéchisme de persévérance, éditée à plus de 900 000 exemplaires au XIXè siècle (ESR). Écrivain talentueux, chercheur d’une érudition prodigieuse, homme d’Église d’une piété profonde, Mgr Gaume a écrit un véritable chef d’œuvre, qui fait connaître le catholicisme dans toutes ses richesses.

III. THÉOLOGIE

Après avoir appris les rudiments de la foi dans le catéchisme, il convient d’approfondir ses connaissances par quelques études plus poussées. Nous avons choisi les ouvrages de référence pour chaque section de la théologie: dogmatique, morale, ascétique et mystique.
 

Berthier, J. : Abrégé de théologie dogmatique et morale, 1892, (ESR)

Jone, Heribert : Précis de théologie morale catholique, nombreuses éditions dans les années 1930, (ESR)

Ce manuel pratique prend pour base le droit canon et résout les moindres recoins de la morale (gravité de tel ou tel péché, circonstances atténuantes etc.). Livre à avoir sous la main.

Liguori, Saint Alphonse de : Théologie morale, 1748, éditions ultérieures considérablement augmentées. Cet ouvrage est devenu le classique par excellence de cette branche de la théologie et a reçu de l’Église les plus expresses approbations. Saint Alphonse de Liguori est le docteur de la théologie morale (ESR).

Gaume, Mgr : Manuel des confesseurs, écrit au XIXè siècle, (ESR). Ce livre est, en principe, réservé aux clercs. Mais à une époque où les bons confesseurs sont rares et les bons directeurs de conscience encore plus, ce manuel sera très utile aux personnes déjà bien avancées dans la vie intérieure.

BASE Tanquerey : Précis de théologie ascétique et mystique, nombreuses éditions dans la première moitié du XXè siècle, (EP)

Pour savoir comment fonctionne la vie spirituelle, on lira ce manuel magistral. Il faut en effet une formation doctrinale solide, si l’on ne veut pas s’égarer dans le pseudo-mysticisme, qui fait tant de ravages de nos jours. Satan sait fort bien se déguiser en ange de lumière !

Garrigou-Lagrange : Les trois âges de la vie intérieure, ou le résumé : Les trois conversions et les trois voies, (ESJA). On trouve également un résumé du même contenu dans le Tanquerey (voir ci-dessus). Important surtout pour bien comprendre l’étape de la seconde conversion. Beaucoup de chrétiens y sont appelés, mais les directeurs de conscience, étant parfois médiocres, leur donnent de mauvais conseils et lors des épreuves les font chuter plutôt qu’avancer.

Source : http://blog.catholicapedia.net/bibliographie-catholique/

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8 thoughts on “Bibliographie catholique

  1. Bonjour,
    Pourriez-vous donner le lien vers le fameux «Catéchisme illustré de gravures (ESR)»?
    Je n’arrive pas à le trouver.
    Merci.

  2. Il s’agit en réalité de tableaux en couleurs :
    https://saint-remi.fr/fr/catechismes/1095-grand-album-pour-l-explication-du-catechisme-9782816201437.html
    GRAND ALBUM POUR L’EXPLICATION DU CATECHISME
    M. l’abbé MOUTERDE
    Superbe album de 70 chromotypographies (images couleur haute définition sur papier 160 gr) accompagnées d’autant de feuilles explicatives, font voir (le mot est exact et n’est pas une métaphore) tout ce que le catéchisme doit inculquer à la mémoire et au cœur de nos chers enfants. Cette édition de 1899 nous semble une des plus belles réalisations des catéchismes en image. Le texte est en regard de chaque planche couleur. Nous avons réduit le format de l’original peu pratique pour sa taille immense, au format A4, et le résultat est des plus satisfaisant, la manipulation est beaucoup plus pratique. Un ouvrage à mettre dans toutes les familles catholiques !

  3. D’une part, les Leçons de theologie dogmatique de M. l’Abbé Léon Labauche, écrites notamment en réponse à la crise moderniste, ne méritent-elles pas une petite place dans cette bibliographie catholique ?

    D’autre part, une théologie dogmatique et une théologie morale catholiques ET non modernistes n’ont-elles pas continué à exister, au moins jusqu’à l’année 1945, sinon jusqu’à la fin des années 1950 ?

    Pourquoi ne pas citer “l’Initiation théologique”publiée par les éditions du Cerf, à la fin des années 1950, alors que cette Initiation en quatre volumes comporte de nombreuses orientations bibliographiques ?

    N’est-il pas quelque dangereux ou, en tout cas, déformant, de laisser entendre qu’une théologie catholique anti-moderniste contemporaine nécessite une prise d’appui avant tout voire seulement sur un ensemble d’ouvrages qui ont presque tous été écrits avant 1945 ? Le catholicisme anti-moderniste ne compterait-il plus, dans ses rangs, de théologiens catholiques de valeur, pour contrer le modernisme d’aujourd’hui ?

    Merci beaucoup pour toute réponse à ces questions.

    1. D’autre part, une théologie dogmatique et une théologie morale catholiques ET non modernistes n’ont-elles pas continué à exister, au moins jusqu’à l’année 1945, sinon jusqu’à la fin des années 1950 ?

      Bien estimé Benoît Yzern, votre définition de ce qui est catholique et non moderniste [pléonasme à mes yeux] ne serait-elle pas en caoutchouc, excluant l’abrahamisme de Massignon mais fermant les yeux sur l’abrahamisme plus profond dont il n’était qu’une pâle variante ?
      https://catholiquedefrance.fr/quest-ce-que-lopinionnisme/#comment-683

      Au plaisir de poursuivre avec vous cette discussion, et croyant que vous ne demeurerez pas toujours dans l’esquive des charnières du raisonnement (et par surcroît reconnaissant votre art à combler les creux de vos esquives de florissantes digressions philosophiques ; déformation professionnelle, dirait-on).

      1. Ce sont de véritables questions, et non des questions posées pour des raisons purement rhétoriques.

        Plus précisément, et par exemple, un Gardeil et un Grandmaison étaient-ils modernistes ? S’ils l’ont vraiment été, l’ont-ils été autant, et avec la même influence que Chenu, Congar, Rahner et Teilhard ?

        La Somme théologique de Saint Thomas d’Aquin, dans l’Edition des jeunes, est-elle “moderniste” ?

        Si la ligne de démarcation entre la bonne théologie catholique, anti-moderniste, et la mauvaise théologie, pseudo-catholique, car philo-moderniste, est placée en travers d’une année, ou entre la fin d’une décennie et le début de la décennie suivante, cela légitime-t-il le “principe de précaution” qui consiste à concevoir une bibliographie catholique qui repose sur des auteurs qui ont presque tous publié leurs oeuvre très en amont de la “deuxième crise moderniste” qui a commencé à la fin des années 1920 ou au début des années 1930 ?

        Enfin, et là je suis particulièrement demandeur d’une réponse, si une approche théologique catholique anti-moderniste est vraiment aussi cohérente, légitime, nécessaire, orthodoxe, pertinente et réaliste qu’on est en droit de le penser, comment se fait-il qu’il y ait aussi peu de théologiens catholiques anti-modernistes, aujourd’hui, qui soient clairement et fermement opposés au modernisme d’aujourd’hui ?

        Certes, se former nécessite de longues années et, par ailleurs, il est difficile de se former pendant des années, au contact de certains auteurs modernistes, pour pouvoir critiquer leurs idées et leurs oeuvres en toute connaissance de cause, et non en se contentant de dire que ce sont des “hérétiques”, mais où sont, aujourd’hui, les théologiens catholiques anti-modernistes dont l’Eglise et les fidèles ont tant besoin, pour critiquer d’une manière argumentée les lubies (post-)conciliaires ?

        1. Je sais bien que ce sont de vraies questions, et ce n’était pas ce que je critiquais.

          Vous ne posez pas ces questions pour rien : elles sont des éléments d’un vaste problème.

          Mais, lorsque vous vous trouvez confronté à un critère qui vous permettrait de trancher, aussitôt vous détournez votre regard, et concentrez votre attention sur mille autres morceaux épars, dans lesquels on ne reconnaît pas d’emblée la forme de l’ensemble.

          On pourrait en revenir à ceci : puisque l’abrahamisme de Massignon est à vos yeux, si je ne m’abuse, hétérodoxe ou hérétique (et hérétique au mien), que n’en déduisez-vous la suite sur le problème que vous évoquez, ou sur d’autres thèses moins orthodoxes encore ?

          Je vous remercie en tout cas pour votre réponse.

          1. Je peux à la fois accomplir un pas dans votre direction et effectuer un pas dans celle du réel, en disant ce qui suit : encore plus depuis le début des années 1930 que depuis celui des années 1890, en philosophie chrétienne et en théologie catholique, la bienveillance, l’indulgence, l’ouverture et la créativité érudites se sont substituées à la vigilance, à l’exigence, à la fidélité et à la réceptivité orthodoxes, ce qui a eu depuis hier (le concile Vatican II) et jusqu’à aujourd’hui (le concile Vatican III par ‘morceaux” du pape Francois) des conséquences “déregulatrices” et “desordonnatrices”, au sein de la théologie catholique.

            Donc, après mûre réflexion, mais certes pas d’emblée, j’accepte de reconnaître “la forme de l’ensemble” : oui, le paysage intellectuel catholique contemporain, dans sa composante néo-catholique post-conciliaire, est fréquemment chaotique, sinon anarchique ou erratique, non en dépit mais en raison de certaines orientations fondamentales qui font, par exemple, que les livres des partisans des esprits de Casablanca, d’Assise, de Tibhirine, d’Abou Dahbi ou d’Amazonie, sont considérés comme devant faire presque autant autorité, ou comme devant avoir presque autant d’importance que, par exemple, les livres de saint Augustin et ceux de saint Thomas d’Aquin.

            Donc, si hérésie il y a, elle se manifeste par un adogmatisme et par un consensualisme, ou, si vous préférez, par un concordisme et par un irénisme systématiques, qui découle du fait que la composante ou la dimension agonistique de la foi catholique et de la vie chrétienne a été presque completement abandonnée, face à un monde contemporain pourtant anti-chrétien.

            C’est à cause de cet abandon que nous sommes aujourd’hui en présence de clercs philo-modernistes au point d’être philo-postmodernes, qui refusent de mener le combat intellectuel contre la conception libérale de la liberté religieuse et contre la conception égalitariste des diverses religions, alors que ces deux conceptions sont propices, respectivement, au subjectivisme et au relativisme les plus anti-chrétiens qui soient, mais aussi, en un sens, les plus fallacieusement et tendancieusement panchristiques qui soient.

            Il est moins coûteux, sur le plan relationnel, de laisser entendre à un chrétien non catholique ou à un croyant non chrétien qu’il est, lui aussi, en chemin, sur la route du consensus, en direction de “l’unité”, que de lui faire entendre qu’il est dans l’erreur, à cause de sa conception erronée de l’Eglise ou de Dieu, et qu’il n’est pas dispensé de retour dans l’Eglise catholique ou de conversion vers Jésus-Christ, sous prétexte que Vatican II “est venu, a vu et a vaincu”.

            Donc, au sortir de quatre “ruptures instauratrices”, à caractère moderniste, respectivement au début des années 1890, au début des années 1930, au début des années 1970, au début des années 2010, c’est en un sens la moindre des choses que certains catholiques anti-modernistes mettent tous les auteurs philo-modernistes dans le même sac et s’en remettent d’une manière contra-positionnelle, par exemple, au thomisme du Père Pègues, bien que cette attitude génère parfois des injustices, au préjudice de certains auteurs (Balthasar, de Lubac) ou de certaines entités (les Dominicains de Fribourg et ceux de Toulouse).

          2. Je peux à la fois accomplir un pas dans votre direction et effectuer un pas dans celle du réel, en disant ce qui suit : encore plus depuis le début des années 1930 que depuis celui des années 1890 …

            Si j’avais le goût de me lancer des fleues en donnant l’air de concéder à autrui, je constaterais la concordance heureuse entre votre votre mouvement vers le réel et votre rapprochement de mon propos… ! 😉

            Plus sérieusement, c’est encore une belle esquive à la fois de l’argument que j’avais proposé à votre critique, et même de la question, cruciale pour votre propos, de la source des deux mouvements superficiellement contradictoires que vous décrivez, prisant l’un et blâmant l’autre.

            « la forme de l’ensemble » : oui, le paysage intellectuel catholique contemporain, dans sa composante néo-catholique post-conciliaire, est fréquemment chaotique, sinon anarchique ou erratique, non en dépit mais en raison de certaines orientations fondamentales qui font, par exemple, que les livres des partisans des esprits de Casablanca, d’Assise, de Tibhirine, d’Abou Dahbi ou d’Amazonie, sont considérés comme devant faire presque autant autorité, ou comme devant avoir presque autant d’importance que, par exemple, les livres de saint Augustin et ceux de saint Thomas d’Aquin.

            Donc, si hérésie il y a, elle se manifeste par un adogmatisme et par un consensualisme, ou, si vous préférez, par un concordisme et par un irénisme systématiques …

            Comme pour évolutionnisme, il y a des sens différents possibles pour concordisme ; selon l’un de ces sens, saint Thomas d’Aquin et saint Augustin étaient concordistes. Je ne dis pas cela pour vous, étant sûr de ne pas vous l’apprendre, mais il me semble utile de le rappeler pour la suite. Au sens où vous devee l’entendre ici, je suis d’accord, c’est une partie du problème, mais, de mon point de vue, une partie seulement.

            certains catholiques anti-modernistes mettent tous les auteurs philo-modernistes dans le même sac et s’en remettent d’une manière contra-positionnelle, par exemple, au thomisme du Père Pègues, bien que cette attitude génère parfois des injustices, au préjudice de certains auteurs (Balthasar, de Lubac) ou de certaines entités (les Dominicains de Fribourg et ceux de Toulouse).

            De mon point de vue, les auteurs « philo-modernistes » participent d’un ensemble de mouvements qui ont une racine commune, qu’ils ne pouvaient ignorer.

            Mais le mouvement « contra-positiinnel », ou de réaction (si l’on peut dire), dans les traits qu’il peut avoir excessivement, tire son origine de l’activité des mêmes milieux, souvent des mêmes personnes, activité antérieure déjà aux années 1930 et même 1890. Mais, encore une fois, nous élargissons ici un champ déjà trop large pour des commentaires.

            Si l’on admet qu’être adogmatique n’est pas catholique, que l’abrahamisme n’est pas catholique, que ce qui est outre l’est moins encore, on a déjà une esquisse de tableau d’ensemble en tout cas.

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