Catholiques de France

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5 thoughts on “Intelligence du christianisme – Modernes et primitifs – Alain Pascal

  1. Le thèse d’une « double tradition » de l’humanité a les mêmes conséquences pratiques que toutes les doctrines manichéennes dont elle est supposée être l’antithèse, alors qu’elle n’en est que l’autre face. C’est un antignosticisme qui agit de fait en catalyseur de l’entrisme gnostique, comme celui d’un Guénon (le plus franc-maçon des auteurs).

    L’ « histoire secrète de la philosophie grecque » est une généralisation abusive du même tonneau. Quand on prend au sérieux les auteurs ésotéristes, même si on les veut combattre on est leur allié de fait.

    Saint Ambroise de Milan, saint Jérôme de Stridon et saint Augustin, plus tard saint Thomas d’Aquin se sont appuyés sur la philosophie grecque. Vouloir se détourner de leur œuvre, c’est, au nom d’une démarche puriste, tourner le dos à la tradition catholique ; c’est rejoindre ce christianisme que le futur Pie IX dénonça comme bigot et démoniaque, celui, maçonnisé, des milieux « ultras » de la restauration.

    Sur de telles bases, on cautionne facilement les accusations calomniatrices de gnostiques contre de fameux antignostiques, et on prend de même le parti de régimes maçonniques antichrétiens (les Sudistes n’étaient pas plus des diables que quiconque, mais ils n’étaient pas moins dirigés par des francs-maçons que les Nordistes).

    1. Quelques citations tirées de cette vidéo de monsieur Alain Pascal :

      « Le mondialisme est anti-chrétien. »

      L’empire des Habsbourg, régime loué par monsieur Pascal, était mondialiste, ouvertement.

      « L’imposture rationaliste, à cause de Descartes »

      La raison, c’est Aristote. Et Descartes se réclama d’une raison qu’il n’atteignit peut-être pas, mais sur laquelle il écrivit assez de bonnes pages pour que de respectables religieux catholiques les enseignassent. Car on n’est pas tout bon ou tout mauvais, quand on est humain.

      « la fin de l’esclavage, puisque que évidemment le christianisme est à l’origine de l’abolition de l’esclavage »

      Il y a un lien entre les deux, mais à résumer ainsi on atteint le grotesque : les États d’Europe furent chrétiens pendant quatorze siècles sans que l’esclavage y fût aboli. La catholique Espagne (dont le roi était le « rex catholicus »), par ses colonies, fut un temps le plus grand marché d’esclaves au monde.

      Inversement, à peine le christianisme fût-il détrôné que les puissances européennes abolirent l’esclavage, au nom des « droits de l’homme » que monsieur Pascal nous dit être anti-chrétiens (ce que je ne conteste pas, mais qui ne soutient pas son propos).

      L’esclavage fut d’abord aboli malgré les révolutionnaires, qui promettaient ce bel avenir mais pour les calendes grecques (annonçant 75 ans de délai ! de délai renouvelable, bien sûr). La vérité est qu’en déclarant la guerre à l’Angleterre, maîtresse des mers, après avoir démantelé notre marine, la république s’était rendu impossible le contrôle des colonies où le renversement du roi, leur (relatif) protecteur, avait amené les Noirs à une victorieuse insurrection (1793). La république ne fit que sauver la face en leur accordant (1794) cette liberté qu’ils avaient prise d’eux-mêmes. La paix revenue (1802), les révolutionnaires conseillèrent au premier consul Bonaparte (33 ans, et ne connaissant pas la situation) de rétablir la situation antérieure, ce qu’il fit. La guerre ayant repris, le corps expéditionnaire décimé par les fièvres tropicales disparut, et on ne put durablement rétablir l’esclavage que dans les confettis des colonies. Puis les puissances victorieuses de la France voulurent s’attacher l’approbation générale née de l’abolition républicaine (dont les motifs réels n’étaient pas connus des foules), le capitalisme anglais surtout y trouvant matériellement avantage (le prétexte de la lutte anti-esclavagiste justifiait et couvrait le contrôle du commerce maritime mondial, et permettait le boycott du coton de Louisiane, concurrent de qualité de celui récolté aux Indes, dont le coût était renchéri par un long détour, obligatoire avant l’ouverture du canal de Suez). Les abus anglais sous ce beau prétexte amenèrent les autres pays à prononcer une abolition qu’ils couvrirent de motifs moraux exclusifs.

      Bref : ce furent les sentiments chrétiens qui favorisèrent l’abolition de l’esclavage, mais celle-ci fut pourtant l’œuvre de régimes maçonniques, antichrétiens, qui le firent pour des raisons cachées et peu charitables, se gagnant à bon compte la réputation d’être plus chrétiens que les chrétiens. Ils n’en reste pas moins que ce fut sous leur hégémonie qu’advint ce bien objectif, et que nombre de francs-maçons croient aux motifs affichés.

      « … on dédaigne le pseudo-moyen-âge, on ne va plus vanter les cathédrales, mais on s’émerveille devant les arts primitifs. »

      D’autres chrétiens qui, comme monsieur Pascal, sont des antignostiques gnosticisés, n’ont pas ici cette sagesse : certains vitupèrent les cathédrales gothiques comme œuvres antichrétiennes, c’est-à-dire qu’ils croient les mythes de la franc-maçonnerie en pensant la combattre. Rendons hommage à celui qui évite cette faute.

      « … l’homme primitif se méfie de celui qui va lui voler le feu »

      De quoi parle monsieur Pascal ? Croit-il aux mythes du camp d’en face, comme la prétendue « guerre du feu » ? Les implications de ces fadaises sont la société ouverte de Popper et de Sörös.

      On entend bien que monsieur Pascal est contre les sociétés cosmopolites. Parfait. Hélas, il cautionne (pas seulement ici) les mythes et mensonges qui interdisent qu’on s’y oppose.

      « … si il y a une une révélation à Adam … »

      Je ne commenterai pas le passage antérieur où monsieur Pascal dit qu’il avait été baptisé mais était indifférent, et qu’il a redécouvert le christianisme une fois adulte. Je laisse seulement lire et écouter cela.

      « … l’initié de l’époque, c’est-à-dire le sorcier … »

      Mythe (cher au franc-maçon Guénon, entriste des milieux conservateurs et musulmans) d’une tradition initiatique primordiale. Je crois connaître un peu cette question, et je proteste : c’est un mensonge ésotériste destiné à éclipser le caractère factice et relativement récent de leurs traditions, lesquelles ne sont qu’une inversion du christianisme. La cabale n’est qu’une inversion postérieure à son modèle et sans identité autre que négative. Les sorciers d’une manière générale l’étaient par don personnel, non par enseignement ésotérique. On n’étaye pas les mensonges qui servent d’appui à ce qu’on veut combattre.

      Valable ou pas, la comparaison du sorcier au journaliste mériterait quant à elle pour ses implications d’être précisée.

      « On est évidemment, avec le mythe du forgeron, à l’origine de l’alchimie, à l’origine de la prétention maçonnique. »

      Abusif. Un mythe utilisé pour justifier une prétention (comme d’autres mythes, que monsieur Pascal cautionne pourtant) peut n’impliquer pas ces prétentions. Abusus non tollit usum.

      « La révolution a fait revenir les cultes du cosmos, les cultes cosmiques, et tous ces cultes-là comprenaient un sacrifice humain. »

      Non. C’est faux. Certaines religions du cosmos (c’est-à-dire de la Création, même non perçue sous l’aspect chrétien de ce mot) en comportèrent, pas toutes. Et il y eut aussi des changements. C’est aussi absurde que dire, contre les faits, que le catholicisme impliquerait les bûchers d’hérétiques.

      C’est encore une caution des mensonges maçonniques. Qu’on lise Morals and dogma du très important franc-maçon Albert Pike (général de cet État sudiste vers lequel penche monsieur Pascal), et on verra cette même erreur de perspective, et combien elle justifie dans cet ouvrage la damnation du christianisme. Croire les mensonges de ce que l’on veut combattre, c’est combattre contre sa propre cause.

      « Le premier culte, c’est un culte féminin. »

      J’ai trouvé cette thèse d’un culte primordial féminin et lumaire opposé à un culte masculin solaire chez des cabalistes seulement, essayant de vendre leur salade ésotériste aux féministes et à ceux qui réprouvent les censures religieuses contre leur sexualité personnelle. Encore un énorme mythe cabaliste chaudement approuvé par l’anticabaliste Alain Pascal. Et une supercherie grotesque, comme le savent les historiens. Quelle est la prochaine étape ? Souscrire aux thèses de Margaret Meade ?

      « On sacrifie pricipalement des jeunes filles. »

      Vrai parfois, parfois faux. Les sacrificateurs considérèrent en bien des temps que la valeur du sacrifice dépendait de la vigueur du sacrifié, le jeune guerrier en étant alors la victime désignée.

      « Il y aura évidemment un immense apport du judaïsme, qui est déjà de substituer au sacrifice humain le sacrifice du bouc émissaire. »

      En fait le bouc émissaire était l’équivalent non des sacrifices mais des purifications rituelles (februaria à Rome). Le judaïsme (qui est ici évidemment le judaïsme de l’époque de la caste sacerdotale) « remplaça » (?) les sacrifices humains par les sacrifices d’animaux, au temple de Jérusalem. Cela se faisait antérieurement et ailleurs, et n’est pas une innovation du judaïsme. On faisait aussi des oblations dans maintes contrées.

      Question : en quoi est-il chrétien de supposer une période de sacrifices humains effectifs remplacés par quoi que ce soit dans le judaïsme sacerdotal ? Qui ne voit que les implications de la thèse de monsieur Pascal ne sortent pas (pas du tout !) du concile de Trente ? Ou est-ce que je le trompe fort ? Qu’on me réponde sur cette question, car c’est grave.

      La mention de deux cents millions de « sacrifiés » au vingtième siècle est aberrante. La victime d’une guerre ou d’une répression politique n’est pas la victime d’un sacrifice, car le sacrifice humain implique un rituel faisant de la victime une offrande sacrée. On est entre le naufrage de la réflexion et la grave supercherie, selon le degré d’aveuglement nous ayant valu cette aberration.

      « Cette violence est liée à ce que l’on appelle le naturalisme, c’est-à-dire la négation de Dieu »

      Non, ce n’est pas le sens du mot naturalisme. Citons Pie IX :
      https://www.vatican.va/content/pius-ix/la/documents/encyclica-quanta-cura-8-decembris-1864.html

      « Etenim probe noscitis, Venerabiles Fratres, hoc tempore non paucos reperiri, qui civili consortio impium absurdumque naturalismi, uti, vocant, principium applicantes audent docere, «optimam societatis publicæ rationem, civilemque progressum omnino requirere, ut humana societas constituatur et gubernetur, nullo habito ad religionem respectu, ac si ea non existeret, vel saltem nullo facto veram inter falsasque religiones discrimine». »

      Traduction :
      https://www.wikiberal.org/index.php?title=Pie_IX

      « En effet, il vous est parfaitement connu, Vénérables Frères, qu’aujourd’hui il ne manque pas d’hommes qui, appliquant à la société civile l’impie et absurde principe du naturalisme, comme ils l’appellent, osent enseigner que « la perfection des gouvernements et le progrès civil demandent impérieusement que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie religion et les fausses ». »

      Nombre de ces doctrinaires croient en un dieu – Robespierre fit même brûler en effigie l’athéisme. Grave erreur de perpective, susceptible à elle seule de détourner du camp duquel se réclame monsieur Pascal tout honnête homme la percevant et prenant cet auteur pour un porte-parole du combat contre la cabale.

      « … où l’on chante « Qu’un sang impur abreuve nos sillons », n’est-ce pas ? C’est le retour du sacrifice qui vient avec la révolution, qui est une ré-volution, c’est-à-dire le retour au culte cosmique. »

      Non. Ces paroles d’un chant militaire n’ont pas ce sens. Elles s’appliquent à de « féroces soldats » supposés venir « égorger nos fils, nos compagnes ». Elles n’ont pas été chantées avant 1792, alors que des massacres avaient eu lieu déjà. Elles ne concernèrent que la France. Leurs implications n’ont donc rien de l’étendue de temps ni de gravité (deux cents millions de morts) que monsieur Pascal voudrait leur imputer, pour les besoins de sa thèse. C’est dérisoire. Et ça ne donne pas une image sérieuse de son propos, pourtant juste sur bien des points, mais pâtissant de ces manifestation d’aveuglement ou de manipulation. Je parierais gros qu’il s’abuse lui-même par passion pour sa propre thèse.

      La révolution ne fut pas un retour, bien que ce soit en effet le sens de ce mot. Ses partisans la voulaient présenter comme un retour à une situation antérieure à ce qui donc aurait été une anomalie : le christianisme. Or le mensonge maçonnique et antichrétien de ce prétendu retour est justement ce que cautionne monsieur Pascal, qui saute sur la faille qu’il a cru voir, sans mesurer qu’elle implique l’universalité naturelle d’un état anti-chrétien de l’homme, voué ainsi à Lucifer comme sa possession personnelle.

      « Depuis la révolution, c’est-à-dire le retour au culte cosmique, les humains sont sacrifiés. On l’a vu dans les guerre mondiales. »

      Voici que les guerres deviennent des sacrifices humains, pour les besoins de cette thèse qui rejoint un mensonge antichrétien. Non, une guerre n’est pas un ensemble de sacrifices humains, sinon toutes les guerres le sont, y compris celles menées par des États chrétiens.

      La guerre de 14-18 tua un vingtième à peu près des Européens ; celle de 39-45, un douzième environ. La guerre de Trente Ans, guerre de religion entre catholiques et protestants, tua un tiers des habitants d’Europe centrale, taux atteint dans aucun pays lors des deux autres conflits. Question : qui fut victime de sacrifices humains entre 1618 et 1648 ? Les habitants de Magdebourg ? de Saverne ? les victimes de l’armée protestante seulement ? Le duc d’Albe était gentil, mais Staline était méchant, il y aurait donc de bonnes victimes et de mauvaises victimes selon les bons sentiments religieux du massacreur, dirait-on ? Qui ne voit le manichéisme implicite de ce genre d’absurdités ? Qui ne voit qu’il rend haïssable ce qui est saint ?

      « C’est pour cela que je suis antimoderne, que je suis contre-révolutionnaire, et que ce livre participe à la défense du christianisme, que nous devons tous poursuivre avec acharnement. Donc, je conclus toujours de la même façon : nous sommes des croisés. Je vous remercie. »

      Antimoderne : c’est le titre d’un ouvrage de Maritain, inspirateur (qui tenta après coup d’en paraître critique) de Vatican II. Contre-révolutionnaire : comme l’éminent franc-maçon antichrétien Joseph de Maistre, tant prisé des conservateurs qui ne voient pas ce que visait sa critique de la révolution. Croisé : c’est aussi ce qu’osa prétendre être Bush fils, massacreur d’Irakiens au nom d’un messianisme bien peu croisé. Il ne suffit pas de se définir par des mots pour se justifier.

      Le vrai sens de l’œuvre de René Girard, sur laquelle s’appuie Alain Pascal, est qu’un état antérieur de sauvagerie généralisée fut remplacé par la modération du rejet du bouc émissaire (ce qui a certaines implications, on le rappelle) ; que les victimes des foules sont des victimes expiatoires, et choisies parce qu’inoffensives (et devinez qui est présenté, dans nos sociétés acriuelles, comme archétype du bouc émissaire de l’histoire de l’Europe chrétienne, et se voit ainsi couronné par cette thèse ?) ; que Sancho Pança admirait Don Quichotte, mais que si l’on est moins sage que lui on veut être ce qu’on admire, et pour cela le tuer pour en prendre la place (et de qui les sociétés chrétiennes sont-elles accusées d’aoir voulu se débarrasser, et d’avoir voulu usurper la prédestination ?). On n’est pas un croisé quand on fait du Girard.

      Répandre, au nom du Christ et des croisés, et avec maintes vérités, des interprétations abusives susceptibles d’écarter du camp duquel on se réclame toute personne honnête et cultivée à la fois ; propager des mythes qui rejoignent les leçons de Girard, la thèse de Guénon, les fantasmes de Meade ; s’adonner enfin, sur ce terrain, au manichéisme consistant à exécrer chez autrui ce que l’on ne condamne pas chez soi, en quoi est-ce finalement se distinguer de ces auteurs cabalistes qu’on réprouve ?

      1. Pour bien comprendre pourquoi Descartes fut jugé utile par des ecclésiastiques soucieux de combattre l’irréligion et d’étouffer ce qui deviendra les prétendues « Lumières » (Baratay Éric. Le Christ est-il mort pour les bêtes ? In: Études rurales, n°147-148, 1998. Mort et mise à mort des animaux. pp. 27-48) :
        https://www.persee.fr/doc/rural_0014-2182_1998_num_147_1_3618

        « La certitude d’une totale matérialité de l’animal ne vacille jamais. Au XVIIᵉ siècle, la plupart des clercs véhiculent l’idée, issue d’Aristote et de saint Thomas d’Aquin [Caprotti 1989], que la bête est le composé d’un corps et d’une âme sensitive, cause interne de la vie et des mouvements, dont le lien avec la matière n’est jamais mis en doute. Le capucin Yves de Paris écrit, en 1640, que «les âmes des brutes sont des formes corporelles, extraites du sein de la matière, héritières de ses qualités, inséparables de sa substance avec laquelle, étant jointes, elles font le mixte» [op. cit. : 379]. Ce sentiment est encore plus évident avec la théorie cartésienne de l’ animal-machine qui s’impose dans les années 1670-1820 afin de répondre aux libertins du XVIIᵉ siècle, puis aux philosophes des Lumières, qui remettent en cause le statut de l’homme en rapprochant celui-ci de la bête. Pour bien distinguer ces deux créatures, les partisans de Descartes postulent qu’une âme ne peut être matérielle, refusent toute spiritualité à l’animal et le réduisent au rang d’une mécanique dotée de rouages (le cœur, le cerveau), de ressorts (les muscles), de fluides (le sang), évoluant comme un automate grâce aux esprits animaux. Formées avec les parties les plus fines du sang, ces particules sortent du cerveau, lorsque les nerfs sont sensibilisés par les objets extérieurs, et vont faire bouger les muscles adéquats [Dilly 1676 : 28-32, 66-71, 206-208, 226-227, 278].»

        Descartes s’opposant aux « Lumières » : on le voit, le simplisme de certaines thèses aura pour effet de rebuter toute personne à la fois honnête et informée. Et, en généralisant de telles interprétations abusives et fondamentalement manichéennes, un camp s’assurerait bientôt de n’être empli que d’esprits manichéens, pharisaïques ou crédules, exactement par le même mécanisme qui fait que les escroqueries dites « à la nigériane » aboutissent à ce que se sélectionnent elles-mêmes les victimes les plus crédules.

        C’est dire que, si de tels excès deviennent la règle dans les milieux de la tradition catholique, celle-ci sera aussi éloignée que possible de compter dans ses rangs des saint Augustin et des saint Thomas d’Aquin.

        Et ainsi se meurt une foi, sapée hélas par ceux qui se veulent ses meilleurs défenseurs, et à qui on ne saurait certes pas reprocher de manquer de capacités intellectuelles.

    2. Quelques citations tirées de cette vidéo de monsieur Alain Pascal :

      « Le mondialisme est anti-chrétien. »

      L’empire des Habsbourg, régime loué par monsieur Pascal, était mondialiste, ouvertement.

      « L’imposture rationaliste, à cause de Descartes »

      La raison, c’est Aristote. Et Descartes se réclama d’une raison qu’il n’atteignit peut-être pas, mais sur laquelle il écrivit assez de bonnes pages pour que de respectables religieux catholiques les enseignassent. Car on n’est pas tout bon ou tout mauvais, quand on est humain.

      « la fin de l’esclavage, puisque que évidemment le christianisme est à l’origine de l’abolition de l’esclavage »

      Il y a un lien entre les deux, mais à résumer ainsi on atteint le grotesque : les États d’Europe furent chrétiens pendant quatorze siècles sans que l’esclavage y fût aboli. La catholique Espagne (dont le roi était le « rex catholicus »), par ses colonies, fut un temps le plus grand marché d’esclaves au monde.

      Inversement, à peine le christianisme fût-il détrôné que les puissances européennes abolirent l’esclavage, au nom des « droits de l’homme » que monsieur Pascal nous dit être anti-chrétiens (ce que je ne conteste pas, mais qui ne soutient pas son propos).

      L’esclavage fut d’abord aboli malgré les révolutionnaires, qui promettaient ce bel avenir mais pour les calendes grecques (annonçant 75 ans de délai ! de délai renouvelable, bien sûr). La vérité est qu’en déclarant la guerre à l’Angleterre, maîtresse des mers, après avoir démantelé notre marine, la république s’était rendu impossible le contrôle des colonies où le renversement du roi, leur (relatif) protecteur, avait amené les Noirs à une victorieuse insurrection (1793). La république ne fit que sauver la face en leur accordant (1794) cette liberté qu’ils avaient prise d’eux-mêmes. La paix revenue (1802), les révolutionnaires conseillèrent au premier consul Bonaparte (33 ans, et ne connaissant pas la situation) de rétablir la situation antérieure, ce qu’il fit. La guerre ayant repris, le corps expéditionnaire décimé par les fièvres tropicales disparut, et on ne put durablement rétablir l’esclavage que dans les confettis des colonies. Puis les puissances victorieuses de la France voulurent s’attacher l’approbation générale née de l’abolition républicaine (dont les motifs réels n’étaient pas connus des foules), le capitalisme anglais surtout y trouvant matériellement avantage (le prétexte de la lutte anti-esclavagiste justifiait et couvrait le contrôle du commerce maritime mondial, et permettait le boycott du coton de Louisiane, concurrent de qualité de celui récolté aux Indes, dont le coût était renchéri par un long détour, obligatoire avant l’ouverture du canal de Suez). Les abus anglais sous ce beau prétexte amenèrent les autres pays à prononcer une abolition qu’ils couvrirent de motifs moraux exclusifs.

      Bref : ce furent les sentiments chrétiens qui favorisèrent l’abolition de l’esclavage, mais celle-ci fut pourtant l’œuvre de régimes maçonniques, antichrétiens, qui le firent pour des raisons cachées et peu charitables, se gagnant à bon compte la réputation d’être plus chrétiens que les chrétiens. Ils n’en reste pas moins que ce fut sous leur hégémonie qu’advint ce bien objectif, et que nombre de francs-maçons croient aux motifs affichés.

      « … on dédaigne le pseudo-moyen-âge, on ne va plus vanter les cathédrales, mais on s’émerveille devant les arts primitifs. »

      D’autres chrétiens qui, comme monsieur Pascal, sont des antignostiques gnosticisés, n’ont pas ici cette sagesse : certains vitupèrent les cathédrales gothiques comme œuvres antichrétiennes, c’est-à-dire qu’ils croient les mythes de la franc-maçonnerie en pensant la combattre. Rendons hommage à celui qui évite cette faute.

      « … l’homme primitif se méfie de celui qui va lui voler le feu »

      De quoi parle monsieur Pascal ? Croit-il aux mythes du camp d’en face, comme la prétendue « guerre du feu » ? Les implications de ces fadaises sont la société ouverte de Popper et de Sörös.

      On entend bien que monsieur Pascal est contre les sociétés cosmopolites. Parfait. Hélas, il cautionne (pas seulement ici) les mythes et mensonges qui interdisent qu’on s’y oppose.

      « … si il y a une une révélation à Adam … »

      Je ne commenterai pas le passage antérieur où monsieur Pascal dit qu’il avait été baptisé mais était indifférent, et qu’il a redécouvert le christianisme une fois adulte. Je laisse seulement lire et écouter cela.

      « … l’initié de l’époque, c’est-à-dire le sorcier … »

      Mythe (cher au franc-maçon Guénon, entriste des milieux conservateurs et musulmans) d’une tradition initiatique primordiale. Je crois connaître un peu cette question, et je proteste : c’est un mensonge ésotériste destiné à éclipser le caractère factice et relativement récent de leurs traditions, lesquelles ne sont qu’une inversion du christianisme. La cabale n’est qu’une inversion postérieure à son modèle et sans identité autre que négative. Les sorciers d’une manière générale l’étaient par don personnel, non par enseignement ésotérique. On n’étaye pas les mensonges qui servent d’appui à ce qu’on veut combattre.

      Valable ou pas, la comparaison du sorcier au journaliste mériterait quant à elle pour ses implications d’être précisée.

      « On est évidemment, avec le mythe du forgeron, à l’origine de l’alchimie, à l’origine de la prétention maçonnique. »

      Abusif. Un mythe utilisé pour justifier une prétention (comme d’autres mythes, que monsieur Pascal cautionne pourtant) peut n’impliquer pas ces prétentions. Abusus non tollit usum.

      « La révolution a fait revenir les cultes du cosmos, les cultes cosmiques, et tous ces cultes-là comprenaient un sacrifice humain. »

      Non. C’est faux. Certaines religions du cosmos (c’est-à-dire de la Création, même non perçue sous l’aspect chrétien de ce mot) en comportèrent, pas toutes. Et il y eut aussi des changements. C’est aussi absurde que dire, contre les faits, que le catholicisme impliquerait les bûchers d’hérétiques.

      C’est encore une caution des mensonges maçonniques. Qu’on lise Morals and dogma du très important franc-maçon Albert Pike (général de cet État sudiste vers lequel penche monsieur Pascal), et on verra cette même erreur de perspective, et combien elle justifie dans cet ouvrage la damnation du christianisme. Croire les mensonges de ce que l’on veut combattre, c’est combattre contre sa propre cause.

      « Le premier culte, c’est un culte féminin. »

      J’ai trouvé cette thèse d’un culte primordial féminin et lumaire opposé à un culte masculin solaire chez des cabalistes seulement, essayant de vendre leur salade ésotériste aux féministes et à ceux qui réprouvent les censures religieuses contre leur sexualité personnelle. Encore un énorme mythe cabaliste chaudement approuvé par l’anticabaliste Alain Pascal. Et une supercherie grotesque, comme le savent les historiens. Quelle est la prochaine étape ? Souscrire aux thèses de Margaret Meade ?

      « On sacrifie pricipalement des jeunes filles. »

      Vrai parfois, parfois faux. Les sacrificateurs considérèrent en bien des temps que la valeur du sacrifice dépendait de la vigueur du sacrifié, le jeune guerrier en étant alors la victime désignée.

      « Il y aura évidemment un immense apport du judaïsme, qui est déjà de substituer au sacrifice humain le sacrifice du bouc émissaire. »

      En fait le bouc émissaire était l’équivalent non des sacrifices mais des purifications rituelles (februaria à Rome). Le judaïsme (qui est ici évidemment le judaïsme de l’époque de la caste sacerdotale) « remplaça » (?) les sacrifices humains par les sacrifices d’animaux, au temple de Jérusalem. Cela se faisait antérieurement et ailleurs, et n’est pas une innovation du judaïsme. On faisait aussi des oblations dans maintes contrées.

      Question : en quoi est-il chrétien de supposer une période de sacrifices humains effectifs remplacés par quoi que ce soit dans le judaïsme sacerdotal ? Qui ne voit que les implications de la thèse de monsieur Pascal ne sortent pas (pas du tout !) du concile de Trente ? Ou est-ce que je le trompe fort ? Qu’on me réponde sur cette question, car c’est grave.

      La mention de deux cents millions de « sacrifiés » au vingtième siècle est aberrante. La victime d’une guerre ou d’une répression politique n’est pas la victime d’un sacrifice, car le sacrifice humain implique un rituel faisant de la victime une offrande sacrée. On est entre le naufrage de la réflexion et la grave supercherie, selon le degré d’aveuglement nous ayant valu cette aberration.

      « Cette violence est liée à ce que l’on appelle le naturalisme, c’est-à-dire la négation de Dieu »

      Non, ce n’est pas le sens du mot naturalisme. Citons Pie IX :
      https://www.vatican.va/content/pius-ix/la/documents/encyclica-quanta-cura-8-decembris-1864.html

      « Etenim probe noscitis, Venerabiles Fratres, hoc tempore non paucos reperiri, qui civili consortio impium absurdumque naturalismi, uti, vocant, principium applicantes audent docere, «optimam societatis publicæ rationem, civilemque progressum omnino requirere, ut humana societas constituatur et gubernetur, nullo habito ad religionem respectu, ac si ea non existeret, vel saltem nullo facto veram inter falsasque religiones discrimine». »

      1. Traduction :
        https://www.wikiberal.org/index.php?title=Pie_IX

        « En effet, il vous est parfaitement connu, Vénérables Frères, qu’aujourd’hui il ne manque pas d’hommes qui, appliquant à la société civile l’impie et absurde principe du naturalisme, comme ils l’appellent, osent enseigner que « la perfection des gouvernements et le progrès civil demandent impérieusement que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie religion et les fausses ». »

        Nombre de ces doctrinaires croient en un dieu – Robespierre fit même brûler en effigie l’athéisme. Grave erreur de perpective, susceptible à elle seule de détourner du camp duquel se réclame monsieur Pascal tout honnête homme la percevant et prenant cet auteur pour un porte-parole du combat contre la cabale.

        « … où l’on chante « Qu’un sang impur abreuve nos sillons », n’est-ce pas ? C’est le retour du sacrifice qui vient avec la révolution, qui est une ré-volution, c’est-à-dire le retour au culte cosmique. »

        Non. Ces paroles d’un chant militaire n’ont pas ce sens. Elles s’appliquent à de « féroces soldats » supposés venir « égorger nos fils, nos compagnes ». Elles n’ont pas été chantées avant 1792, alors que des massacres avaient eu lieu déjà. Elles ne concernèrent que la France. Leurs implications n’ont donc rien de l’étendue de temps ni de gravité (deux cents millions de morts) que monsieur Pascal voudrait leur imputer, pour les besoins de sa thèse. C’est dérisoire. Et ça ne donne pas une image sérieuse de son propos, pourtant juste sur bien des points, mais pâtissant de ces manifestation d’aveuglement ou de manipulation. Je parierais gros qu’il s’abuse lui-même par passion pour sa propre thèse.

        La révolution ne fut pas un retour, bien que ce soit en effet le sens de ce mot. Ses partisans la voulaient présenter comme un retour à une situation antérieure à ce qui donc aurait été une anomalie : le christianisme. Or le mensonge maçonnique et antichrétien de ce prétendu retour est justement ce que cautionne monsieur Pascal, qui saute sur la faille qu’il a cru voir, sans mesurer qu’elle implique l’universalité naturelle d’un état anti-chrétien de l’homme, voué ainsi à Lucifer comme sa possession personnelle.

        « Depuis la révolution, c’est-à-dire le retour au culte cosmique, les humains sont sacrifiés. On l’a vu dans les guerre mondiales. »

        Voici que les guerres deviennent des sacrifices humains, pour les besoins de cette thèse qui rejoint un mensonge antichrétien. Non, une guerre n’est pas un ensemble de sacrifices humains, sinon toutes les guerres le sont, y compris celles menées par des États chrétiens.

        La guerre de 14-18 tua un vingtième à peu près des Européens ; celle de 39-45, un douzième environ. La guerre de Trente Ans, guerre de religion entre catholiques et protestants, tua un tiers des habitants d’Europe centrale, taux atteint dans aucun pays lors des deux autres conflits. Question : qui fut victime de sacrifices humains entre 1618 et 1648 ? Les habitants de Magdebourg ? de Saverne ? les victimes de l’armée protestante seulement ? Le duc d’Albe était gentil, mais Staline était méchant, il y aurait donc de bonnes victimes et de mauvaises victimes selon les bons sentiments religieux du massacreur, dirait-on ? Qui ne voit le manichéisme implicite de ce genre d’absurdités ? Qui ne voit qu’il rend haïssable ce qui est saint ?

        « C’est pour cela que je suis antimoderne, que je suis contre-révolutionnaire, et que ce livre participe à la défense du christianisme, que nous devons tous poursuivre avec acharnement. Donc, je conclus toujours de la même façon : nous sommes des croisés. Je vous remercie. »

        Antimoderne : c’est le titre d’un ouvrage de Maritain, inspirateur (qui tenta après coup d’en paraître critique) de Vatican II. Contre-révolutionnaire : comme l’éminent franc-maçon antichrétien Joseph de Maistre, tant prisé des conservateurs qui ne voient pas ce que visait sa critique de la révolution. Croisé : c’est aussi ce qu’osa prétendre être Bush fils, massacreur d’Irakiens au nom d’un messianisme bien peu croisé. Il ne suffit pas de se définir par des mots pour se justifier.

        Le vrai sens de l’œuvre de René Girard, sur laquelle s’appuie Alain Pascal, est qu’un état antérieur de sauvagerie généralisée fut remplacé par la modération du rejet du bouc émissaire (ce qui a certaines implications, on le rappelle) ; que les victimes des foules sont des victimes expiatoires, et choisies parce qu’inoffensives (et devinez qui est présenté, dans nos sociétés acriuelles, comme archétype du bouc émissaire de l’histoire de l’Europe chrétienne, et se voit ainsi couronné par cette thèse ?) ; que Sancho Pança admirait Don Quichotte, mais que si l’on est moins sage que lui on veut être ce qu’on admire, et pour cela le tuer pour en prendre la place (et de qui les sociétés chrétiennes sont-elles accusées d’aoir voulu se débarrasser, et d’avoir voulu usurper la prédestination ?). On n’est pas un croisé quand on fait du Girard.

        Répandre, au nom du Christ et des croisés, et avec maintes vérités, des interprétations abusives susceptibles d’écarter du camp duquel on se réclame toute personne honnête et cultivée à la fois ; propager des mythes qui rejoignent les leçons de Girard, la thèse de Guénon, les fantasmes de Meade ; s’adonner enfin, sur ce terrain, au manichéisme consistant à exécrer chez autrui ce que l’on ne condamne pas chez soi, en quoi est-ce finalement se distinguer de ces auteurs cabalistes qu’on réprouve ?

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