Consécration des Familles au Sacré-Coeur


Dans un peuple, l’armée représente l’élément géné­reux de ceux qui sont prêts à sacrifier leur vie pour défendre contre toute violence ce qui vaut plus qu’une vie d’homme : l’unité, l’intégrité de la nation, la justice, les li­bertés individuelles et collectives, en un mot « la tranquilli­té de l’ordre dans la paix ».


L’armée est au service du pays qui est plus grand qu’elle, elle l’est sous la direction de l’État, qui, lui aussi, est au service du pays. L’armée ne doit jamais être l’instrument aveugle de l’État pour une politique de domination de ce qu’il a mission de protéger et de défendre.


Pie XII a, sur cette question, précisé, dans son message de Noël 1954, la pensée de l’Église :


« Beaucoup estiment, en effet, que la haute politique s’oriente à nouveau vers un type d’État nationaliste, fer­mé sur lui-même, concentrant ses forces et instable dans le choix de ses alliances qui, de ce fait, n’est pas moins perni­cieux que celui qui fut en honneur au siècle dernier.


On a trop vite oublié l’énorme accumulation de sacri­fices de vies et de biens extorqués par ce type d’État, ainsi que les charges économiques et spirituelles écrasantes qu’il imposait.


Mais le fond de l’erreur consiste à confondre la vie na­tionale, au sens propre, avec la politique nationaliste ; la première, droit et gloire d’un peuple, peut et doit être développée ; la seconde, source de maux infinis, ne sera ja­mais assez rejetée.


La vie nationale est, de sa nature, l’ensemble actif de toutes les valeurs de civilisation qui sont propres à un groupe déterminé, le caractérisent et constituent comme le lien de son unité spirituelle. Elle enrichit en même temps, par sa contribution propre, la culture de toute l’humanité.


Dans son essence, par conséquent, la vie nationale est quelque chose de non politique ; c’est si vrai que, comme le démontrent l’histoire et l’expérience, elle peut se déve­lopper côte à côte avec d’autres, au sein d’un même État, comme elle peut aussi s’étendre au-delà des frontières poli­tiques de celui-ci.


La vie nationale ne devint un principe dissolvant pour la communauté des peuples que lorsqu’elle commença à être exploitée comme moyen pour des fins politiques, à savoir quand l’État dominateur et centralisateur fit de la natio­nalité la base de sa force d’expansion. On eut alors l’État nationaliste, germe de rivalités et source de discordes. »
Cette vie nationale si importante, n’est-ce pas d’abord la vie des familles qui la composent ? C’est dans la famille que prennent naissance, se développent, s’éduquent les ci­toyens de demain.


Pour préparer cet avènement du règne du Sacré-Coeur, ne fallait-il pas qu’après la consécration de l’armée par son chef, une autre consécration plus importante encore s’ac­complisse : celle de la France faite « au nom de l’Église » par les familles de France dont l’autorité est antérieure à celle de l’État ?


Or, cette consécration se fit le 17 juin 1945 ; préparée par l’immense et triomphal périple de N.-D. du Grand Retour, acclamée dans toute la France au nom de « chez nous soyez Reine », on vit, en 1944 et 1945, un million de familles se consacrer au Sacré-Coeur, famille par famille, paroisse par paroisse, diocèse par diocèse ; puis, au jour dit, devant tous les cardinaux, archevêques et évêques de France présents à Montmartre, en présence d’une foule innombrable, trois cents pères de famille mandatés par leurs évêques s’avan­çaient et consacraient la France au Sacré-Coeur au nom de l’Église :


« Coeur de Jésus, nous voici assemblés devant vous ; au nom de plus d’un million de familles qui se sont consa­crées à vous, et qui, en ce moment, dans le pays tout entier, s’unissent à nous ; nous venons vous consacrer la France. La famille est la cellule de la Patrie ; la France est faite de toutes les familles qui la composent ; nous, représentants des familles qui vous sont consacrées et de toutes les fa­milles chrétiennes françaises, nous avons le droit de parler au nom de la France.

Coeur de Jésus, nous savons votre amour de prédilection pour la France ; entre elle et Vous, un « pacte d’alliance » (Pie X) a été scellé à Reims ; à l’heure la plus tragique de son histoire, vous lui avez envoyé Jeanne d’Arc ; malgré nos démérites, c’est chez nous que vous avez révélé au monde votre Coeur ; vous avez demandé nommément à la France de se consacrer à Vous et vous lui avez fait, pour le jour où elle accomplirait cet acte, des promesses de victoire et de prospérité ; Coeur de Jésus, nous croyons à la « vocation chrétienne » de la France.

La France que vous aimez recon­naît ses torts ; elle a péché contre vous ; elle a péché contre la famille par le divorce qui la détruit, par l’égoïsme qui la ré­duit ou la rend stérile, par la faiblesse qui n’a pas le courage d’élever des enfants. Elle a péché. Elle le reconnaît. Ses dé­sastres ont été son châtiment. Dans ce temple, jailli de son repentir et de son amour, nous vous demandons pardon pour la France.

Malgré ses fautes, elle est vôtre. Nous vous avons consacré nos foyers ; nous voulons que vous soyez :


– le Maître de nos esprits par la foi jalousement gardée et transmise à nos enfants ;
– le Maître de nos consciences par votre loi fidèlement observée ;
– le Maître de nos coeurs par votre Amour ;


Régnez sur les foyers de France. Régnez aussi, nous le voulons, sur la France. Elle est divisée : rapprochez les es­prits et les coeurs ; faites que les Français s’aiment entre eux ; rendez-lui son prestige et son rayonnement. Coeur de Jésus, la France est à Vous ; nous vous la consa­crons. Il y a des Français qui vous ignorent ; vous les aimez quand même. Il y en a qui vous ont renié ; vous les aimez quand même. Il y en a qui vous combattent ; vous les aimez quand même.


Nous ferons comme vous. Vivant au milieu d’eux, nous voulons, par notre exemple, par notre apostolat, les rame­ner à vous. Et que luise bientôt l’aube du jour où tous les Français, librement revenus à Vous, d’un seul coeur vous consacreront leur patrie que vous aimez. »


« Vive le Coeur de Jésus Vive la France. »


La voix du pape se faisait alors entendre sur la voix des ondes, en un radio-message qui reste comme la charte des familles de France consacrées au Sacré-Coeur :


« Nous sommes de coeur au milieu de vous, au milieu de la France, en ce moment de votre consécration au Coeur de Jésus, l’émouvante consécration des familles françaises.


Un million de familles consacrées au Coeur du Christ qui aime la France ! Quelle splendeur, quelle puissance, quelle responsabilité aussi ! Car les destinées de votre patrie sont entre vos mains, mais à la double condition que, fiers de votre appartenance au Christ et conscients de la force qu’elle vous confère, vous vous montriez imperturbable­ment fidèles à cette appartenance et que vous usiez vaillam­ment de cette force.


La valeur et la prospérité d’un peuple résident non pas dans l’action aveugle d’une multitude confuse, mais dans l’organisation normale des familles saines et nombreuses où règne, sous l’autorité respectée du père, sous la sage vigilance et la prévoyance de la mère, l’union intime et confiante des enfants.


Chaque famille s’étend, se dilate dans la parenté qu’unissent les liens du sang, et les alliances entre les fa­milles y ajoutent encore leur enchevêtrement et consti­tuent, maille par maille, tout un réseau dont la souplesse et la solidité assurent l’unité à la nation, à la grande famille, au grand foyer qu’est la patrie. Réseau tellement parfait et délicat que chaque maille qui viendrait à se rompre ou à se relâcher risquerait de compromettre, avec l’intégrité du réseau, tout l’organisme de la société.


Or, cette rupture ou ce relâchement, cet affaiblissement ou cette dégénérescence de la famille se produisent avec leurs funestes conséquences toutes les fois qu’une atteinte est portée à la sainteté ou à l’indissolubilité du mariage, toutes les fois qu’une atteinte est portée à la fidélité ou à la fécondité conjugales, toutes les fois que l’autorité pater­nelle, par l’abdication des parents ou par l’insubordination des enfants, se trouve mise en échec.


Des fragments de familles brisées ou désagrégées ne sont guère plus propres à constituer une société saine et stable que le conglomérat amorphe d’individus, dont nous par­lions récemment. Grande, certes, et noble, et pure, est la fé­licité d’un foyer patriarcal, intact dans son intégrité comme dans sa dignité. Mais qui oserait dénier que cette félicité est le prix de l’attachement à ces devoirs austères et à la victoire sur des obstacles ou des attraits, sur les passions déréglées ou sur les tentations de la chair ou du coeur ? Or, pour cela, il faut du courage, un courage généreux, surtout perma­nent, continu, à longueur d’années, à longueur de vie.


À moins d’ignorer étrangement la faiblesse humaine, de fermer obstinément les yeux devant l’évidence, force est de reconnaître qu’un tel courage ne peut surgir, moins encore se soutenir par le seul effet des arguments de la simple et froide raison. Les doctrines pures, la morale sublime, les espérances éternelles de la foi chrétienne contribuent gran­dement à l’engendrer. Mais ce n’est pas, surtout, son action extérieure qui donne à la religion du Christ cette salutaire influence, cette vertu merveilleuse de sauvegarder la pure­té, la sainteté du mariage et de la famille au milieu d’une pauvre civilisation corrompue et corruptrice.


Le Christ agit dans les âmes par l’infusion de sa grâce plus encore que par ses enseignements, ses exhortations, ses promesses. Surtout, Il est, par son Eucharistie, la source de la vie et de la sainteté.


Quel temple devient le foyer ou le père, la mère, les en­fants vivent nourris et abreuvés de la chair et du sang de Dieu ! Quand une famille vit ainsi du Christ, quand, par sa consécration au Coeur du Christ, elle a ratifié son union avec Celui qui a vaincu le monde et s’est vouée à l’amour, au service, au règne de ce Coeur divin, quand elle fait de son règne l’idéal dont elle vit ; quand plusieurs familles, ani­mées du même esprit, conduites par le même idéal, sont réunies dans l’intégrité du corps mystique de l’Homme- Dieu ; quand ces familles sont des milliers, des centaines de milliers ; quand un million de pères, de mères, quand des millions et des millions d’enfants consacrent avec une ar­deur passionnée toutes leurs énergies à promouvoir le règne de Jésus, qui mesurera la puissance d’une telle armée, sous un tel Chef ?


L’hésitation, la défiance abattant vos courages et brisant votre élan stériliseraient tous vos efforts.


C’est pourquoi nous vous indiquons la portée de votre appartenance au Christ pour vous donner conscience de votre force. Vous resterez donc tout à Lui, sous sa conduite, sous son règne. C’est la condition essentielle pour pouvoir produire ses effets merveilleux.


Courage donc, familles chrétiennes, familles françaises du Sacré-Coeur. Votre phalange est assez considérable, as­sez forte pour marcher avec assurance. Et pourtant, regar­dez, ne voyez-vous pas qu’autour de vous d’autres foyers, en nombre plus important que les vôtres, attendent pour marcher avec vous d’entendre de vous les paroles qui les entraîneront.


Votre consécration au Coeur de Jésus, c’est le pacte entre Lui et vos familles. Il en a pris l’initiative par sa promesse :

« Je les bénirai », disait-Il à Marguerite-Marie.


De votre côté, avec toute la solennité que vos moyens vous permettaient, sous la bénédiction du prêtre, son repré­sentant, vous avez mis son image à la place d’honneur de votre foyer, dont vous le proclamiez le souverain, vous en­gageant officiellement à le regarder et à le traiter comme tel.


Lui ne manquera jamais à sa parole : Il est le Dieu fidèle. Ne manquez pas à la vôtre. Faites-le régner chez vous et autour de vous. Votre demeure est désormais sacrée… c’est le sens de votre consécration. Rien ne doit offenser les yeux, les oreilles, le coeur de Jésus. Il est le roi et doit y recevoir de votre fidélité un hommage permanent de réparation, de dévotion, d’amour.

Chef très aimé de votre foyer, il est as­socié intimement à toute sa vie et il ne se conçoit aucune peine, aucune joie, aucune inquiétude, aucune espérance à laquelle vous le laisseriez étranger.

C’est le royaume du Christ, il est sacré. Il n’y aurait qu’une vaine complaisance d’amour-propre ou plutôt qu’une humiliante contradic­tion à prendre conscience de votre force, si vous n’en usiez aussi pour la défense, la conquête des droits du Coeur de Jésus, qui sont aussi vos droits, les droits de votre famille et de votre patrie.


Pères de familles chrétiennes, l’honneur et la vitalité de la France, il vous appartient et vous avez le devoir d’agir et de parler au nom de vos familles, au nom de la France, de cette France qui, au lendemain de ses douloureux désastres, inscrivit sur le fronton de la basilique l’ardeur de son amour et de son attachement : Gallia Poenitens, Devota Et Grata (France pénitente, fervente et reconnaissante).


Au nom de vos familles et de la France, édifiez la sainteté du mariage et l’unité du foyer ravagé par les divorces ; dé­fendez l’autorité des parents, leur liberté d’élever chrétien­nement leurs enfants ; défendez l’enfance et l’adolescence contre les pratiques impies et déshonnêtes, contre la séduc­tion des spectacles scandaleux, contre la licence pernicieuse d’une presse et d’une littérature sans contrôle.


Au nom de vos familles et de la France, revendiquez pour vos cités la décence et la dignité de la rue et des places pu­bliques ; revendiquez le droit pour les citoyens de pratiquer ouvertement leur religion ; revendiquez pour votre clergé, pour les religieux et les religieuses, celui de faire du bien aux petits, aux ignorants, aux pauvres, aux malades, aux mourants.


Au nom de vos familles et de la France, préparez et pro­curez l’avènement du règne de Dieu et du Coeur de Jésus dans votre patrie, la reconnaissance de sa divine majesté, la sanctification du dimanche et des fêtes, l’exercice du culte public ; la pratique de la justice, de la charité sociale, de la fraternité chrétienne entre tous les Français par leur récon­ciliation mutuelle dans le calme et dans l’ordre, en un mot dans la paix. Vous venez de proclamer, une fois de plus, que vous croyez à la vocation chrétienne de la France.


Il est fidèle, l’Auteur de cette sublime vocation.Que par vous, familles chrétiennes consacrées au Sacré-Coeur de Jésus, la France, de son côté, soit fidèle à y répondre !


C’est dans cette confiance que nous vous donnons, à vous tous, à tout votre bien-aimé peuple, à la jeunesse sur­tout, espoir de la patrie, avec toute l’affection de notre coeur, notre Bénédiction apostolique. » Pie XII.


Depuis cette date mémorable, des familles par milliers font tous leurs efforts pour rester fidèles à leur serment. Le pape, recevant, le 18 septembre 1951, un groupe d’entre elles, insiste :


« Parce qu’elle tient de Dieu, son existence et sa digni­té, sa fonction sociale, la famille en est responsable devant Dieu. Ses droits et ses privilèges sont inaliénables, intan­gibles ; elle a le devoir, avant tout devant Dieu, et secondai­rement devant la société, de défendre, de revendiquer, de promouvoir effectivement ces droits et ces privilèges, non seulement pour son propre avantage, mais pour la gloire de Dieu, pour le bien de la collectivité. »


et précisait :


« La famille n’est pas pour la société ; c’est la société qui est pour la famille. La famille est la cellule fondamentale, l’élément constitutif de la communauté de l’État, car, pour employer les expressions mêmes de Notre Prédécesseur Pie XI d’heureuse mémoire, « la cité est ce que la font les fa­milles et les hommes, dont elle est formée, comme le corps est formé des membres ».


Puis, ayant dénoncé avec vigueur les campagnes im­mondes entreprises, sous prétexte « d’initiation sexuelle », il concluait :


« Pères de famille ici présents : il y a sur toute la face du monde, en tous pays, tant d’autres chrétiens, pères de fa­mille comme vous, qui partagent vos sentiments ; coali­sez-vous donc avec eux – bien entendu sous la direction de vos évêques – ; appelez à vous prêter leur puissant concours toutes les femmes et les mères catholiques, pour combattre ensemble, sans timidité comme sans respect humain, pour briser et arrêter ces campagnes de quelque nom, de quelque patronage qu’elles se couvrent et s’autorisent. »


C’est ce travail de défense, entrepris par les familles grou­pées autour des revues « Paternité » et « Défense du foyer » que le pape a voulu bénir et encourager.


Les familles ne viendront jamais trop nombreuses à cette action, puisqu’il précise que « les vrais fidèles de l’Église s’engageront jusqu’au dernier pour soutenir les droits es­sentiels des familles ».

Extrait du livre : https://editions-voxgallia.fr/produit/que-les-francais-fassent-leurs-tresors-des-testaments-de-saint-remi-charlemagne-saint-louis-louis-xvi/

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