Les racines gnostiques et millénaristes de la religion des droits de l’homme – Brice Michel

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« tout comme le communisme et les autres avatars de la religion de l’humanité, l’actuelle religion politique des droits de l’homme est à la fois un millénarisme et une gnose ».Jean-Louis Harouel. Les droits de l’homme contre le peuple.

Aujourd’hui, force est de constater que les droits de l’homme sont devenus la référence morale ultime de l’action politique tant sur le plan national que sur le plan international. Sur le plan national, par exemple, ces valeurs ont pris le pas sur celles de la souveraineté nationale au point qu’elles rendent de plus en plus impossible désormais à un Etat national de lutter contre l’immigration sans être accusé de porter atteinte aux droits de l’homme.

Sur le plan international, on constate que les guerres impérialistes de déstabilisation d’Etats non alignés sur les intérêts américains ont bien souvent été justifiées au nom des droits de l’homme. Cette sorte de sacralisation des droits de l’homme a été relevée par de nombreux intellectuels. Ainsi l’écrivain Régis Debray, l’historien François Furet, ou encore le juriste Jean Carbonnier voient la doctrine des droits de l’homme comme la religion d’Etat officielle, une sorte de religion civile non avouée.

Avec la laïcité et la démocratie, les droits de l’homme constituent ainsi un des dogmes intouchables de la modernité. Entendons-nous bien, l’idée ici n’est évidemment pas de remettre en cause les droits fondamentaux des individus. Ces droits-libertés n’ont d’ailleurs pas été inventés par la Révolution, c’est ce qu’on appelait autrefois les libertés publiques » (liberté de circuler, sûreté, inviolabilité du domicile etc..).

Le problème, ce sont ces droits subjectifs nouveaux engendrés par l’idéologie des droits de l’homme, droits qui n’en sont pas : droit à immigrer (dans le sens où un Etat ne pourrait refuser l’entrée de nouveaux arrivants sur son territoire), droit à l’avortement, droit à changer de sexe, car ces droits relèvent plus d’une l’obsession de la discrimination que d’une authentique philosophie de la liberté.

Ces prétendus droits sont d’ailleurs aujourd’hui paradoxalement invoqués pour limiter la liberté des autres et s’inscrivent en réalité dans une logique liberticide. Avec la loi Pleven de 1972, quelqu’un qui estime avoir fait l’objet d’une discrimination de la part d’un individu peut déclencher un procès contre elle. Et de manière générale, celui qui ose remettre en cause le bien-fondé de ces nouveaux droits de l’homme est considéré comme hors-jeu du discours politique.

Pour comprendre en quoi ces droits de l’homme constituent une (fausse) religion, il apparaît utile, en préambule, de rappeler la définition fameuse que Durkheim donne de la religion dans Les formes élémentaires de la vie religieuse : « une religion est un système solidaire de croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées, c’est à dire séparées, interdites, croyances et pratiques qui unissent en une même communauté morale, appelée Église, tous ceux qui y adhérent. » Indéniablement, nous constatons que la doctrine des droits de l’homme fonctionne comme un « système solidaire de croyances et de pratiques » qui unissent les pays occidentaux en « une même communauté morale ».

L’historien Samuel Moyn, s’est intéressé à ce sujet dans son ouvrage paru en 2012. « Droits de l’homme : la dernière utopie ». Il y montre comment les droits de l’homme sont le dernier grand récit, l’ultime utopie moderne qui a pris aujourd’hui la suite des grandes idéologies universalistes déchues, comme le communisme.

Plus récemment, l’historien du droit français Jean-Louis Harouel a également abordé ce sujet dans son ouvrage paru en 2016 : « Les droits de l’homme contre le peuple ».Nous nous inspirons principalement de cet ouvrage dans cet article.Harouel expose en détail l’idée selon laquelle les droits de l’homme sont devenus de nos jours la véritable religion séculière de l’Europe occidentale.

L’intérêt particulier de l’analyse d’Harouel est d’avoir creusé cet aspect religieux des droits de l’homme. Selon lui, l’idéologie des droits de l’homme est en effet le « dernier avatar de la religion de l’humanité ». Il l’appelle encore la « religion humanitaire », religion humanitaire qui est au cœur de la pensée socialiste. Avec la sécularisation de la société, explique Harouel, la religiosité des individus s’est déplacée et a investi les institutions politiques. Ces institutions fonctionnent ainsi comme des formes sécularisées du sacré qui se substituent aux religions traditionnelles.

Ce concept de religion séculière que Jean-Louis Harouel applique aux droits de l’homme est emprunté au philosophe américain d’origine autrichienne, Eric Voegelin. Voegelin fut en effet le premier à proposer le terme de « religions séculières » et de « religions politiques » pour analyser les idéologies, notamment les idéologies fascistes. Voegelin, s’intéressait à l’aura de religiosité dont se parait le fascisme en général. Dans son ouvrage, « « Les religions politiques », ouvrage paru en 1938 dans le contexte de montée du nazisme, il analysa par exemple le nazisme comme une religion politique en mettant l’accent sur sa dimension spirituelle.

L’intuition fondamentale de Voegelin était que les racines du mal sont à chercher dans la fausse religiosité. Selon lui, cette fausse religiosité est véhiculée notamment par le gnosticisme qui exerce une influence fondamentale sur le processus d’émergence de la modernité. Cette fausse religiosité gnostique doit être comprise comme une sorte de mouvement historique s’inscrivant dans le temps long. Il est la source spirituelle centrale des totalitarismes modernes pour Voegelin. Pour lui, le totalitarisme est donc en réalité une religion politique, c’est-à-dire une expérience religieuse subvertie.

Voegelin pense donc la modernité politique comme une rupture avec le paradigme occidental chrétien : alors que la société chrétienne a comme fin ultime la félicité dans l’au-delà, la société moderne entend au contraire faire du bonheur terrestre la fin ultime de la société, idée qu’on retrouvera ensuite dans le matérialisme moderne et le socialisme.

Jean-Louis Harouel, s’appuyant sur ces analyses, reprend donc ce concept de religion séculière et l’applique à l’utopie actuelle des droits de l’homme dont il montre ainsi la dimension totalitaire. Il explique tout d’abord comment la religion des droits de l’homme est le dernier avatar de la religion de l’humanité (I) puis il montre (II)les racines gnostiques et millénaristes de la société.

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2 thoughts on “Les racines gnostiques et millénaristes de la religion des droits de l’homme – Brice Michel

    1. Un petit complément : au contraire de ce que croit l’excellent historien Johann Chapoutot, le texte de Mit brennender Sorge ne visait que certains milieux NS, pas le parti lui-même ; par ailleurs, son chef n’etait pas déiste, et ne s’est pas rapproché des païens à la fin de la décennie 1930-1940 : il les a bridés jusqu’au bout, et les témoignages de ceux de ses proches n’ayant pas à redouter de procès, après la guerre, ne me paraissent pas laisser de doute sur la persistance de la foi qu’il avait dans son enfance. Ce qui ne change rien ici aux limites à apporter aux analayses ci-dessus.

      On pourrait dire à peu près la même de l’Action française à l’époque, bien que son chef fût, lui, agnostique. Bref : les frontières sont mal tracées.

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