Transgenre et féminisme – Stanislas Berton
Extraits de l’article publié sur le blog Matt’s Musings le 26 mai 2022 sous le titre
« The Transgender Origins of Feminism »
Traduit de l’anglais par Stanislas Berton

“Une femme ne portera point un habillement d’homme, et un homme ne mettra point des vêtements de femme; car quiconque fait ces choses est en abomination à l’Éternel, ton Dieu.”
Deutéronome 22 :5
Il y a quelque chose d’intéressant dans la folie qui s’est emparée du mouvement féministe. Nous assistons à un combat pour son contrôle. Qui sont les combattants ? Si les femmes se trouvent d’un côté du ring, qui se trouve à l’autre bout ? Des hommes habillés en femmes. Une situation qui, pour de nombreuses personnes, est aussi déroutante qu’étonnante.
Les débats sur les questions de genre ont longtemps porté sur les minorités considérées comme les plus discriminées et il ne s’agit désormais plus des femmes, ou même des femmes de couleur, mais des hommes qui veulent s’identifier à des femmes. Cela a conduit à un schisme au sein du mouvement féministe car nous avons désormais des hommes qui veulent des droits pour les femmes mais qui font ces revendications en tant que « femmes ». Les femmes devraient elles considérer la volonté de ces hommes d’être protégés en tant que femmes comme légitime ? Où devraient elles rechigner à partager leurs lieux de vie et leurs combats avec des personnes nées avec un pénis ? Où le féminisme doit-il s’arrêter ?
Ces débats furent mis sur le devant de la scène lors de l’audition visant à confirmer Kentanji Brown Jackson au poste de juge de la Cour Suprême des États-Unis, quand Mme Brown Jackson donna une réponse étonnante à ce qui aurait dû être une question simple. Elle affirma en effet qu’elle ne pouvait pas définir ce qu’était une femme car elle n’était pas « une biologiste ». Cela est de toute évidence absurde, ma fille de quatre ans pourrait donner une réponse immédiate à cette question. Mais tel est le dilemme auquel le féminisme intersectionnel et une large partie de la gauche se trouve confrontés.
[…]
Vous entendrez parfois certains chrétiens évangélistes affirmer que le féminisme est un mouvement inspiré par l’Évangile. J’ai démontré en détail la fausseté de cette affirmation. Les premiers mouvements féministes « évangélistes » rejetaient les enseignements bibliques sur le genre. Mais à travers cet article, je voudrais montrer quelque chose dont la plupart des gens n’ont absolument pas conscience, à savoir que le phénomène transgenre fait partie intégrale du mouvement féministe depuis ses origines. J’apporterai la démonstration historique de ce fait dans quelque instants mais commençons par étudier la signification exacte du terme « transgenre ». Celui-ci signifie « un état ou une condition dans laquelle l’identité de la personne ne se conforme pas aux idées conventionnelles concernant le genre masculin ou féminin. » En d’autres termes, cela signifie transgresser toutes les barrières liées au sexe.
La plupart des activistes trans admettent la réalité biologique des différences sexuelles mais affirment que le genre est une donnée de votre identité ou dépend de la façon dont vous vous sentez vis-à-vis de la représentation de votre genre. Vous pouvez être biologiquement mâle mais psychologiquement femelle ou vice versa. L’essence du combat des activistes trans vise à faire éclater les barrières liées au genre, ce qui est exactement ce que cherchent également à faire les féministes. Ces dernières font souvent référence au concept de « plafond de verre » selon lequel là où les hommes sont allés, les femmes devraient et vont aussi aller, même si cela se produit cent cinquante ans après les hommes.
Par conséquent, si les féministes veulent transgresser les barrières liées au sexe peut-on trouver un lien entre la genèse du mouvement féministe et l’idéologie transgenre ? Oui, on le peut et Per Faxneld l’a documenté dans un livre important « Le féminisme satanique : Lucifer présenté comme libérateur des femmes dans la littérature du XIXe siècle » (Satanic Feminism: Lucifer as Liberator of Woman in Nineteenth-Century Literature).
J’ai déjà présenté à plusieurs reprises les liens fondamentaux entre les idées lucifériennes et la genèse du mouvement féministe et je ne reviendrai donc pas ici sur ce sujet. Il suffit de rappeler que les proto et primo-féministes réinterprètent les actions du diable dans la Genèse. Au lieu de voir le serpent comme celui qui trompe la femme, laquelle donne ensuite le fruit défendu à son mari, elles choisissent d’interpréter cet événement comme la libération de la femme de sa « servitude » envers l’homme et Dieu, c’est-à-dire le « patriarcat ». Voilà d’où sort l’idée de renverser le patriarcat. Dans le cadre de cet article, soulignons que cela signifie que les premières féministes présentent Lucifer ou le diable comme leur libérateur plutôt que comme leur ennemi. Dans la théologie chrétienne, c’est un truisme que de dire que les gens se conforment à l’image des dieux qu’ils vénèrent et dont ils acceptent les commandements. Quelle est donc l’image du diable ?
D’un point de vue conceptuel, les gens ont tendance à considérer le diable comme masculin. Il est le méchant ultime, un très vilain monsieur. La plupart des théologiens ont traditionnellement représenté le diable comme un homme, ou comme une figure masculine et l’ont désigné par le pronom « il ». Cependant, comme le note Faxneld, ce choix ne fait pas l’unanimité. Étant donné que le diable est un ange, cela signifie qu’il n’est pas tenu de se conformer aux règles sexuelles qui s’appliquent aux hommes et aux femmes. La tradition théologique chrétienne n’impose pas un sexe particulier au diable et reconnaît d’ailleurs que les démons peuvent choisir de prendre la forme de n’importe quel sexe.
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Dans de nombreuses représentations médiévales ou prémodernes, le diable est représenté comme un “monstre hermaphrodite”. Les démons sont considérés comme des créatures ontologiquement instables qui transgressent les frontières entre les sexes et les espèces. « La transgression de genre est considéré comme l’expression d’une volonté blasphématoire de défier toute catégorisation naturelle par Lucifer et ses démons. » note Faxneld avant de partager d’horribles représentations du Diable par des artistes prémodernes.
Comme vous pouvez le voir, il était courant de représenter visuellement le diable et les démons comme des êtres fondamentalement instables ne respectant aucune limite, d’ordre sexuel ou naturel. Le diable est l’entité transgressive ultime, ce qui est également une bonne description du mal lui-même. L’action mauvaise se manifeste à travers le désir et l’intention de transgresser les limites fixées par Dieu. D’ailleurs, l’un des mots utilisés dans la Bible pour le péché est « transgression », qui signifie littéralement transgresser les limites de ce que Dieu affirme être bon. Le mal cherche fondamentalement à transgresser toutes les bonnes limites fixées par Dieu.
Non seulement le diable était décrit comme un être transgressif mais il était aussi représenté ou conceptualisé comme une femme ou une femme-serpent. Par exemple, dans le livre d’éducation chrétienne, « Livre pour l’enseignement de ses filles » (1371-1372) ; l’auteur écrit : « Geoffroy tentait de faire pénétrer dans l’esprit de ses filles l’idée que les femmes doivent s’en remettre à leurs pères et à leurs maris dans toutes les affaires, sauf celles concernant la gestion du foyer, utilisant pour cela l’exemple d’Eve qui viola cette règle en conversant avec le serpent qui selon l’histoire avait la partie droite du visage semblable à celle d’une femme »
Étant donné que nous avons l’habitude de le représenter en homme, cela peut nous sembler étrange de voir Satan sous les traits d’une femme mais il s’agit là d’une représentation courante tout au long de l’histoire de l’Église. « Une représentation plus directe du Satan féminin peut être couramment trouvée sous la forme du serpent du jardin d’Éden possédant une tête de femme, avec même parfois une poitrine de femme sur son corps de reptile. Il est difficile d’établir avec précision la date d’apparition de la notion de serpent féminin mais les traductions les plus anciennes de la Bible en latin utilisent le mot « serpens », qui est féminin.
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Il est intéressant de voir le diable représenté en tant que femme mais rappelons une fois de plus que le diable n’est ni homme, ni femme, Satan est un être spirituellement déchu. Le diable se trouve par sa nature même dans une autre catégorie. Même si vous voulez défendre l’idée que les Évangiles tendent à le présenter comme une figure masculine, notez bien que le fait qu’il transgresse toutes les limites participe à sa rébellion contre l’ordre crée par Dieu et participe à son rôle de « Prince des Ténèbres ».
L’image la plus célèbre représentant la nature transgenre du diable est celle de Baphomet. Baphomet est une créature hermaphrodite et constitue une des représentations les plus utilisées au cours du siècle dernier pour symboliser Satan. (…)
Lire le suite de l’article sur : http://stanislasberton.com/index.php/2019/10/12/du-feminisme/
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Cet article (incomplet sur ce site-ci), traduit de l’anglais par Stanislas Berton, s’appuie sur l’ouvrage d’un universitaire suédois, explicitement.
Voici un résumé de l’ouvrage en question.
https://www.barnesandnoble.com/w/satanic-feminism-per-faxneld/1126161663
Sur la religion de Sarah Bernhardt, deux extraits de wikipedia :
1° En français :
2° En anglais :
La partie publiée ici de l’article en anglais définit le mot transgenre, ce qui est une bonne chose, mais ne définit pas le mot féminisme, or celui-ci peut recouvrer plusieurs sens, et surtout il est le sujet même de cette analyse. Par ailleurs les personnalités qui façonnent une mouvance ne sont pas les mêmes que la foule qui peut lui donner de l’importance : l’existence d’un luciférisme avoué chez les unes n’implique rien sur les motivations premières des autres. D’ailleurs l’ouvrage pris pour référence ne semble pas prétendre qu’il n’y aurait pas de féminisme autre que luciférien (même si bien sûr peu de meneurs, fonçant délibérément vers un précipice, suffisent à y entraîner le troupeau).
Par ailleurs l’Église tient Ève pour sainte (et Adam pour saint), et salue Marie, nouvelle Ève, comme mère du Sauveur, écrasant de son talon Satan le serpent, tout comme Dieu annonça à Ève qu’elle et sa descendance voudraient écraser la tête du serpent : la conception catholique d’Ève n’est pas si noire que ce que suggère l’analyse sur laquelle se fonde cet article.
Par rapport aux articles signés par l’auteur de cette traduction, assurément on voit ici le grand progrès de ne pas projeter (au moins dans la partie publiée ici) une image chimérique sur le fondement religieux du monde moderne. Ce fondement n’a de sens que depuis le point de vue biblique, et non pas extra-biblique.
Remarquons que la conception d’un dieu bon libérateur opposé au dieu mauvais qui interdit rejoint celle d’une branche des gnostiques : les ophites. Quant à la nécessité de transgresser, on la trouve chez les caïnites et les sabbataïstes. À ce point, il me semble devoir conseiller la lecture d’Un Prrophète luciférien : Léon Bloy, de Rémy Barbeau. On s’éloigne du féminisme, mais on se rapproche du cœur du luciférisme
Ainsi, le féminisme dans sa branche luciférienne (et selon le sens qu’on donne au mot féminusme on peut en trouver des branches qui n’ont rien à voir avec le luciférisme) apparaît comme une simple facette d’une doctrine bien plus large.
Il convient aussi de rappeler que les suffragettes, qui demandaient le droit de vote pour les femmes, sont ici classées dans la mouvance féministe (c’est normal) : or des personnalités républicaines ont justifié le refus de ce droit de vote féminin par l’influence de l’Église sur les femmes.
Rien n’est manichéen dans le monde (sauf l’esprit des manichéens).